Combien de fois avons-nous entendu ce magnifique air, qui en appelant Marie, nous transporte dans un univers flottant, délicat? Des centaines, voir des milliers de fois, pour la plupart d’entre nous. On l’entend à toutes les sauces : que ce soit par Pavarotti, ou Céline Dion, elle réussit toujours à toucher les cœurs. Je vous invite aujourd’hui à découvrir plus en profondeur cette œuvre, écrite par le grand compositeur allemand Franz Schubert.
Cette chanson, que la plupart d’entre nous connaissent dans sa version latine sous le nom Ave Maria, est en fait un Lied, un type de mélodie allemande chantée par les chanteurs d’opéra, qui fait partie d’un cycle. Son nom original est Ellens dritter Gesang, La troisième Chanson d’Ellen, en français. Comme vous l’aurez probablement compris, la mélodie originale n’est effectivement pas en latin, mais en allemand! Et, elle raconte une tout autre histoire. Le texte est tiré de La Dame du Lac de Walter Scott, qui raconte l’histoire d’Ellen Douglas, cachée dans une grotte accompagnée de son père, qui demande l’aide de la Sainte Marie, alors qu’elle est poursuivie par le chef du clan opposé.
Encore aujourd’hui chanté dans sa version originale dans des concerts de musique classique, dans la culture populaire, on entend exclusivement la version en latin, qui s’est inspirée de la première phrase : Ave Maria. On y a ensuite effacé tout le texte allemand pour le remplacer par la prière Je vous salue Marie, pleine de grâce, dans sa langue originale.
Ave Maria
Gratia plena Maria, gratia plena Maria, gratia plena Ave, ave Dominus Tecum Benedicta tu in mulieribus Et benedictus Benedictus fructus ventris tuae Ventris tuae, Jesus Ave Maria (Ave Maria…) Et in hora mortis nostrae Mortis nostrae Ave Maria
(Ah…)
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Je te salue Marie
Pleine de grâce Marie, pleine de grâce Marie, pleine de grâce Je te salue, que le Seigneur Soit avec toi Tu es bénie entre toutes les femmes Et béni Béni est le fruit de tes entrailles De tes entrailles, Jésus Je te salue Marie (Je te salue Marie…) Maintenant et à l’heure de notre mort De notre mort Je te salue Marie
(Ah…)
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Un réel appel à l’aide, cette prière est utilisée dans des contextes diversifiés : on l’utilise autant pour demander de l’aide lors d’une étape difficile, comme lors de funérailles, que pour demander de l’aide pour des évènements positifs. Un véritable véhicule d’espoir, cette ravissante mélodie nous accompagnes lors des mariages et des baptêmes. Elle est aussi considérée comme un des classiques de Noël, étonnement! Cette pièce à un véritable pouvoir de s’adapter aux besoins émotionnels des gens. Elle se prête parfaitement à toutes les célébrations religieuses, car l’Ave Marie, Je vous salue Marie, est une prière très commune, qui est faite dans plusieurs contextes différents.
Bien que cette pièce n’eût pas du tout été pensée pour être chantée religieusement, on peut ressentir que malgré le côté sombre de la version originale en allemand, cette pièce contient un grand sourire surplombant sa tristesse. Le compositeur lui-même était dans une période très heureuse de sa vie lors de la composition, il était en vacances chez des amis. Lors de la première présentation de la pièce, le public fut immédiatement conquis. Le compositeur justifia son succès en expliquant que même s’il écrivait énormément de musique, il ne forçait jamais au recueillement : il attendait que le recueillement soit naturel, et ainsi, lui permettait de créer des œuvres sincères et touchantes, qui gagnaient le public à tout coup.
Du côté plus musical, on retrouve une écriture très épurée, simple, qui avec ses arpèges au piano évoquant une harpe met en lumière la pureté de la ligne vocale et le texte. La douceur du chant, la sobriété et l’espoir présent dans cette musique lui confèrent une émotion sincère et touchante. Certaines versions sont plus étoffées au niveau de l’arrangement, comme l’ajout de cordes ou d’orchestre complet, surtout dans la deuxième section, mais les arrangements gardent toujours le côté flottant et intime de la pièce. Contrairement à plusieurs mélodies classiques, on y retrouve une forme très accessible, à couplet, avec la ligne musicale de l’Ave Maria se répétant, attirant automatiquement l’oreille de l’auditeur. Avec tous ces éléments, ce n’est pas une surprise que cette pièce se soit taillé une place si importante dans la culture populaire.
Vous serez peut-être surpris d’apprendre que plusieurs autres compositeurs ont aussi composé des Ave Maria très magnifiques, et que vous les avez peut-être entendus auparavant. On entend si souvent l’Ave Maria de Schubert qu’on peut parfois avoir envie de quelque chose de différent, tout en gardant ce côté divin et ce magnifique texte que nous connaissons tous, c’est pourquoi on entend parfois ces versions lors des mariages et des funérailles.
L’Ave Maria de Charles Gounod
Cet Ave Maria, composé sur un prélude de Jean-Sébastien Bach, réunit plusieurs éléments qu’on retrouve dans celui de Schubert, en commençant par les arpèges qui rappellent une harpe et les lignes mélodies allongées et lentes, qui nous font flotter avec la chanteuse, mais surtout, cette lumière d’espoir. Il est probablement le deuxième plus populaire après celui de Schubert.
L’Ave Maria de Caccini
Le dernier Ave Maria que je vous présenterai est plus épuré au niveau des paroles, on y répète que les deux mots Ave Maria, mais il est beaucoup plus chargé au niveau orchestral et émotionnellement. Encore une fois rempli de lignes longues, on sent du moins que la demande d’aide à la Sainte Marie est un peu plus insistance que les autres versions. Elle est cependant très poignante, apportant vers une gamme d’émotions différentes et puissantes.
Une chose est bien certaine, cette magnifique prière phare de l’Église catholique est une toile vierge parfaite pour la musique et plusieurs compositeurs ont su le démontrer de brillante façon. Franz Schubert n’aurait probablement pas pensé que près de 200 ans après sa mort, on est encore touché par cette œuvre divine, intime et remplie d’espoir. Tout ça nous rappelle un élément, que peu importe l’époque, les émotions humaines restent les mêmes.